Paysage
Fédération canadienne de la fauneEnvironnement et Changement climatique Canada
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Les Tourbière du Canada

Mer Bleue bog, Ontario

  • Les tourbières sont des milieux humides dans lesquels de la tourbe se forme et s’accumule avec le temps à partir de plantes mortes, notamment des mousses du genre Sphagnum, les sphaignes, mais aussi d’autres mousses, des carex et des plantes ligneuses.
  • On trouve au Canada plus du tiers des tourbières de la planète. Leur superficie correspond à environ 14 p. 100 du territoire canadien.
  • On distingue trois types de tourbières : les tourbières ombrotrophes, les tourbières minérotrophes et certains marécages.
  • De nombreuses espèces végétales et animales sont adaptées aux conditions très humides des tourbières.
  • Les tourbières abritent un nombre relativement restreint d’espèces spécialisées qui y trouvent l’habitat très particulier dont elles ont besoin; certaines sont communes à des latitudes plus nordiques.
  • Les tourbières jouent un rôle important dans la biosphère, car elles emmagasinent du carbone, ce qui contribue à la régulation du climat. 
  • Les tourbières constituent des archives qui peuvent révéler beaucoup de choses sur l’histoire naturelle et culturelle d’une région.

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Description

Tourbière minérotrophe

Dans le passé, on voyait les tourbières comme des terrains infertiles, détrempés et inutiles. Mais pour qui se renseigne à leur sujet, ces milieux apparaissent plutôt comme des écosystèmes inhabituels, fascinants et complexes. Les tourbières sont des terres humides qui diffèrent des marais, des étangs et de la plupart des marécages par la formation de couches de tourbe. Cette tourbe leur donne des caractéristiques bien particulières.

La couche supérieure, de 30 à 50 cm d’épaisseur, se compose surtout de mousses et d’autres types de plantes vivantes. La tourbe se trouve sous cette couche vivante. Elle est formée de la matière morte et en décomposition provenant des nombreuses plantes qui vivaient auparavant à la surface, notamment des sphaignes, par-dessus laquelle de nouvelles plantes croissent. Cette tourbe a habituellement plusieurs mètres d’épaisseur (à certains endroits, son épaisseur peut atteindre plus de dix mètres!). La tourbe étant très absorbante, elle a des propriétés semblables à celles d’une éponge compacte saturée d’eau, ce qui fait obstacle à la circulation de l’eau. Le niveau d’eau reste ainsi élevé dans une tourbière; il atteint la surface ou presque. Ce niveau d’eau, le niveau phréatique, joue un rôle important de maintien de conditions humides favorisant la croissance d’autres plantes de milieux humides. Aussi, cette accumulation d’eau peut réduire l’inondation en aval ainsi que s’écouler lentement dans les périodes de sécheresse. Comme certains autres types de milieux humides, les tourbières comportent des matières végétales qui peuvent absorber les métaux lourds, d’autres contaminants, des nutriments et des sédiments. Elles peuvent donc décontaminer l’eau. 

Les tourbières présentent des conditions très particulières. La décomposition de la tourbe produit de l’acide humique, ce qui rend l’eau acide (son pH est faible), presque autant que le vinaigre. En outre, l’eau des tourbières est anoxique (elle contient peu d’oxygène) et sa teneur en nutriments, par exemple en azote, est faible. Dans ces conditions, auxquelles s’ajoutent les basses températures caractérisant les sols des latitudes nordiques, la décomposition ne s’effectue que lentement et difficilement sous la surface. Une bonne partie de ce qui est nécessaire à la survie des microorganismes décomposeurs de nombreuses espèces ne se trouve pas dans les couches de tourbe. Ainsi, au lieu de se décomposer rapidement, les mousses mortes s’accumulent sous les mousses vivantes. Dans certains cas, les tourbières des climats tempérés, boréaux, subarctiques et arctiques ont commencé à se former il y a plus de 10 000 ans, soit à la fin de la dernière période glaciaire. La formation d’un centimètre de tourbe prend environ dix ans, mais la croissance des mousses est plus rapide dans les régions où il pleut beaucoup, et la tourbe s’y accumule plus rapidement. Il y a ainsi accumulation, plutôt que décomposition : une grande quantité de matière végétale morte subsiste sous forme de tourbe, composée à 40 p. 100 de carbone. Au lieu d’être transféré à l’atmosphère sous forme de dioxyde de carbone (le CO2 est l’un des produits de la décomposition et un gaz à effet de serre), du carbone est conservé dans les tourbières. Pour cette raison, les tourbières constituent les plus importants lieux de stockage terrestre de carbone (elles renferment environ 30 p. 100 du carbone contenu dans l’ensemble des sols de la planète) et jouent un rôle important dans la régulation des changements climatiques. 

Comme les processus de décomposition ne se font que très lentement dans la tourbe, les tourbières peuvent constituer des archives de l’histoire naturelle et culturelle d’une région. Il arrive que du pollen, des feuilles, des animaux et des artéfacts humains, provenant de la tourbière même ou bien des lieux avoisinants, se retrouvent piégés dans la mousse et soient ainsi soumis aux conditions particulières de la tourbe, propres à la préservation. Des milliers d’année plus tard, des scientifiques peuvent ainsi trouver dans les tourbières des restes d’organismes ayant vécu à proximité et en déduire les caractéristiques de l’environnement local d’autrefois.

Linaigrette

Au Canada, la plupart des tourbières sont soit ombrotrophes, soit minérotrophes. À ces deux catégories, définies en fonction de leur source d’apport en eau, correspondent des milieux bien différents. La composition de l’eau varie selon sa provenance, et cela peut déterminer dans une large mesure le type de peuplement végétal (y compris les espèces de mousses du genre Sphagnum). 

Dans le cas des tourbières ombrotrophes, les précipitations (pluie, brouillard, fonte des neiges) constituent le seul apport d’eau. Ombrotrophe signifie « tiré de la pluie ». Cette eau de précipitations contient peu de minéraux et de nutriments en solution, ou n’en contient pas du tout, et ne neutralise donc pas les acides produits par la végétation en décomposition. C’est pour cette raison que l’eau des tourbières ombrotrophes est acide et que sa teneur en nutriments est faible. Sous la surface de ces tourbières, l’oxygène est également très rare. Ces conditions, et le fait que les organismes qui se trouvent dans ces tourbières peuvent ne pas être protégés du vent et du soleil, ne permettent pas une grande biodiversité. La formation de certaines tourbières ombrotrophes résulte de la croissance progressive de mousses sur un petit lac isolé ou un étang jusqu’à son remplissage, mais la plupart se sont plutôt formées par la croissance de mousses sur un terrain humide, la tourbe finissant par retenir l’eau à cet endroit. Le type de végétation qui pousse à la surface des tourbières ombrotrophes peut varier : certaines ont quelques petits arbres, d’autres ont seulement de petits arbustes, tandis que d’autres encore n’ont que très peu de végétation ligneuse. 

Dans le cas des tourbières minérotrophes, les précipitations ne constituent pas le seul apport d’eau. Ces tourbières sont également alimentées par de l’eau souterraine ou, parfois, par des ruisseaux. En raison de la provenance de leur eau, elles sont plus riches en minéraux dissous, et parfois en nutriments, et elles ne sont habituellement pas acides, mais plutôt neutres ou alcalines (l’eau pure a un pH neutre). Ces conditions peuvent permettre une décomposition plus rapide que dans les tourbières ombrotrophes. La tourbe peut donc s’y former plus lentement; elle y est souvent moins épaisse que dans les tourbières ombrotrophes. Les conditions des tourbières minérotrophes étant plus favorables que celles des tourbières ombrotrophes, la biodiversité y est habituellement plus grande. On en trouve en bordure de lacs et de rivières. Leur surface, comme celle des tourbières ombrotrophes, peut être garnie d’arbres ou d’arbustes ou en être dépourvue. Il arrive que de grandes mares de tourbières ombrotrophes soient bordées de tourbières minérotrophes.  

D’autres types de terrains marécageux peuvent présenter par endroits une accumulation peu profonde de tourbe bien décomposée et constituent donc également des tourbières.

 
 Distribution des tourbières ombotrophes au Canada © Département des ressources naturelles Canada. Tous droits réservés.

 
  Distribution des tourbières minérotrophes au Canada © Département des ressources naturelles Canada. Tous droits réservés.

Pour une carte plus détaillée des tourbières au Canada, veuillez jeter un coup d'oeil à ce fichier PDF (en anglais seulement). 

À l’échelle mondiale, les tourbières occupent entre 3 et 4 p. 100 de la superficie des terres, soit environ quatre millions de kilomètres carrés. On trouve des tourbières aux quatre coins de la planète. À l’ombre de forêts d’Asie, d’Amérique centrale, d’Amérique du Sud et d’Afrique, on trouve certaines tourbières tropicales. Au Canada, on trouve des tourbières un peu partout, mais elles sont plus communes dans les régions boréales, subarctiques et arctiques. Les tourbières canadiennes couvrent environ 170 millions d’hectares, soit environ 14 p. 100 de la superficie totale de notre pays. Il s’agit des milieux humides les plus vastes de notre forêt boréale.


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Plantes et champignons 

 
 Fleur de sarracénie

Les espèces les plus dominantes et répandues auxquelles la formation de tourbe est attribuable sont les mousses du genre Sphagnum, les sphaignes. Ces espèces jouent un rôle-clé: elles modifient leur environnement et y créent de nombreux écosystèmes tourbeux. Il y a environ 120 espèces de sphaignes dans le monde. Comme la plupart des mousses (les plantes de l’embranchement Bryophyta), les sphaignes sont des plantes de petite taille à feuilles courtes. Elles croissent habituellement dans des lieux humides : dépourvues de racines, elles absorbent l’eau dont elles ont besoin par leurs feuilles, dont l’épaisseur est d’une seule cellule. Elles n’ont pas non plus de graines; leur reproduction passe par la production de spores que le vent dissémine. Leurs tissus peuvent retenir beaucoup d’eau, comme une éponge, ce qui favorise leur survie dans les périodes plus sèches. Les sphaignes forment des tapis immergés ou flottants qui peuvent souvent supporter le poids d’un grand orignal!  

Les couches de tourbe et de mousses vivantes forment un substrat de croissance pour d’autres plantes. En raison de la faible teneur en nutriments et en oxygène, particulièrement dans le cas des tourbières ombrotrophes, la végétation est souvent restreinte à des espèces spécialisées. Les plantes qui poussent dans les tourbières doivent être adaptées aux conditions inhabituelles. Elles peuvent par exemple posséder des nodosités, ou excroissances, racinaires dans lesquelles des bactéries les aident à absorber et à conserver des nutriments. Dans les tourbières minérotrophes, qui présentent une plus grande diversité végétale, on trouve des plantes herbacées, des fougères, des graminées et des carex. Certaines de ces plantes peuvent aussi vivre dans les tourbières ombrotrophes, par exemple les linaigrettes, mais les petits arbustes, comme la canneberge, le kalmia à feuilles d'andromède, le cassandre caliculé, les bleuetiers et le thé du Labrador, sont plus communs. On trouve aussi dans les tourbières d’autres espèces de rhododendrons et des orchidées, qui font appel à une mycorhize, une association symbiotique avec un champignon dans leurs racines, pour obtenir davantage de nutriments. Les mares de tourbières permettent la croissance de nénuphars et de quelques autres types de plantes aquatiques. Les écosystèmes tourbeux sont souvent des endroits très colorés du printemps à l’automne, car les plantes tendent à fleurir à des moments différents du printemps et de l’été plutôt que d’entrer en concurrence les unes avec les autres pour la visite des pollinisateurs. En outre, à l’automne, après la première gelée, les feuilles de certains arbrisseaux parent les tourbières d’orange et de rouge!

 Des champignons dans la mousse de sphaigne

Dans la plupart des tourbières, on trouve des plantes carnivores. Ces plantes, notamment des droséras, des utriculaires et des sarracénies, peuvent compenser le manque de nutriments du sol par la capture d’insectes et d’araignées de petite taille. Les proies sont attirées par un liquide sucré et collant qui se trouve sur des feuilles (dans le cas des droséras) ou qui est retenu par des feuilles (dans le cas des sarracénies), dans lequel elles restent prises lorsqu’elles le touchent. Lorsqu’elles ont capturé une proie, ces plantes la soumettent à des liquides digestifs et absorbent ensuite par leurs feuilles ses restes dissous. Elles obtiennent ainsi les nutriments dont elles ont besoin. 

Des arbres peuvent pousser dans des tourbières, mais seulement aux endroits où leurs racines se trouvent assez longtemps hors de l’eau pour permettre leur survie. Parmi les essences les plus communes, mentionnons le saule pédicellé, l’épinette noire, le mélèze, le bouleau gris et le bouleau blanc. Si certains arbres atteignent une taille normale, beaucoup restent petits en raison de la faible quantité de nutriments et d’oxygène dont ils disposent, ainsi que de la grande quantité d’eau et de l’exposition au vent. 

Plus de 600 espèces de champignons ont été recensées dans les tourbières de l’hémisphère Nord. Parmi elles, il y a notamment les espèces qui forment des symbioses (par exemple les mycorhizes et les lichens) avec des plantes ou des algues. Pour la plupart, il s’agit de microchampignons ou de très petits champignons, mais il y a aussi des espèces de champignons macroscopiques. Certains chercheurs pensent que la majeure partie des processus de décomposition qui ont lieu dans les tourbières pourrait être attribuable aux champignons plutôt qu’aux bactéries. 

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Faune et flore

Poissons

On a observé de petits poissons, par exemple des ménés, dans des mares de tourbières. Cependant, à la différence d’autres milieux humides, les tourbières, du fait de leur eau acide et pauvre tant en oxygène qu’en nutriments, n’abritent pas une grande diversité de poissons. En outre, les étangs peu profonds peuvent ne pas permettre aux poissons de survivre à l’hiver en raison de la glace et de la carence en oxygène, mais certains poissons reviennent dans les tourbières en été.

Oiseaux

 
 Bruant de Lincoln

Les tourbières offrent un habitat à des millions de passereaux, de rapaces et d’oiseaux aquatiques. Il s’agit pour la plupart d’oiseaux migrateurs qui s’y reproduisent ou qui y séjournent en été. Quelques espèces se sont adaptées parfaitement aux particularités des écosystèmes tourbeux et en dépendent. C’est par exemple le cas de la Paruline à couronne rousse et du Bruant de Lincoln. Les tourbières répondent également bien aux besoins de l’Hirondelle bicolore, qui peut se régaler d’insectes volants, très nombreux dans ces milieux. On y trouve aussi des Busards Saint-Martin, qui nichent dans leurs herbes hautes. Habitants des forêts, les Tétras du Canada peuvent préférer en été ces lieux découverts qui les protègent de la plupart des prédateurs. Sur des mares de tourbières ou à proximité, on peut voir des oiseaux limicoles, des oies et des canards, notamment des Canards noirs et des Chevaliers solitaires. 

Les tourbières qui offrent plusieurs types d’habitat, dans lesquelles on trouve par exemple différents types de végétation et des mares, sont fréquentées par des oiseaux représentant un ensemble d’espèces plus varié que celui qui est associé aux tourbières plus uniformes. En outre, les grandes tourbières sont importantes pour certaines espèces d’oiseaux, notamment le Bruant des prés, la Paruline à couronne rousse et la Maubèche des champs, une espèce rare.




Mammifères

 Campagnol-lemming de Cooper

Certains grands mammifères, par exemple des orignaux, des cerfs de Virginie, des bisons des bois et des caribous, fréquentent les tourbières aux endroits où les tapis de mousses sont suffisamment épais et fermes pour supporter leur poids et où ils peuvent marcher sans que leurs longues pattes ne s’empêtrent. Certains troupeaux de caribous des bois choisissent expressément les tourbières comme habitat d’hiver, car les nombreuses espèces de lichens qu’on y trouve leur servent de nourriture. Ces écosystèmes jouent un rôle important pour la conservation de l’espèce. On peut également voir des ours noirs, des loups et des lynx roux visiter des tourbières en quête de nourriture. 

Dans les tourbières, les petits mammifères sont plus communs que les grands et représentent un ensemble d’espèces plus varié. Lemmings, campagnols, souris, lièvres d’Amérique, visons, musaraignes, rats musqués et écureuils roux trouvent nourriture et abris dans les tourbières. Peu de petits mammifères se cantonnent dans les tourbières pendant la majeure partie de leur vie, mais les campagnols-lemmings boréaux, les campagnols-lemmings de Cooper et les musaraignes arctiques ont une préférence pour ces milieux. Les castors sont également communs dans les tourbières, et on a constaté qu’ils pouvaient, en endiguant l’écoulement de l’eau de surface dans ces milieux et leurs zones adjacentes, les modifier et les inonder. 

Reptiles et amphibiens

 
 Couleuvre verte

En raison des conditions inhabituelles qui les caractérisent, les tourbières abritent moins d’amphibiens que d’autres types de milieux humides. À part la grenouille verte et la grenouille des bois, peu d’espèces arrivent à se reproduire dans l’eau très acide des tourbières ombrotrophes. Dans l’Est du pays, on constate néanmoins la présence d’autres espèces dans ces tourbières : la grenouille léopard, la grenouille du Nord, le crapaud d’Amérique, la rainette crucifère, la salamandre maculée et la salamandre à points bleus.

Comme bon nombre de tourbières se trouvent dans des régions assez froides, le nombre d’espèces de reptiles y est très limité. On y trouve cependant souvent des tortues ponctuées et des couleuvres rayées de l’Est. En outre, le massasauga de l’Est est un habitant des tourbières minérotrophes du Sud de l’Ontario, et la couleuvre verte habite celles de l’Est du Québec.


 
 Papillon dans du cassandre caliculé

Invertebrés

Dans les couches de tourbe, des microorganismes adaptés à la faible concentration en oxygène – des bactéries, des protistes, etc. – s’emploient à décomposer les sphaignes mortes. Cependant, à cause de leurs conditions hydriques inhabituelles, les tourbières, et particulièrement les tourbières ombrotrophes, abritent beaucoup moins d’espèces d’invertébrés que les autres types de milieux humides. 

Lorsqu’on visite une tourbière, les premiers animaux qu’on aperçoit sont souvent des insectes. D’après les estimations, il y aurait jusqu’à 6000 espèces d’arthropodes aquatiques et terrestres – araignées, insectes et autres invertébrés possédant un squelette externe – dans les tourbières. Leur diversité est la plus importante dans les tourbières minérotrophes. Des spécialistes pensent qu’environ 1 p. 100 de ces espèces ne se retrouvent que dans les tourbières, particulièrement des tourbières minérotrophes. Qu’elles soient de l’un ou l’autre type, cependant, les tourbières offrent à de nombreuses espèces d’arthropodes terrestres, notamment à des espèces de mouches, de moustiques, de libellules, de demoiselles, de guêpes, de coccinelles et d’araignées, un milieu où elles peuvent prospérer.


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Perturbations et menaces 

 
 Rossolis filiforme

Compte tenu de la très grande superficie du Canada et du fait qu’une bonne partie du territoire est inaccessible, il est difficile d’obtenir des statistiques précises sur la destruction et la perturbation des tourbières. Nous savons toutefois qu’environ 90 p. 100 des tourbières du Canada se trouvent dans le Nord, où très peu de gens vivent, et qu’elles y sont plus ou moins intactes. Certaines, cependant, ont été inondées par l’aménagement hydroélectrique ou endommagées par les coupes à blanc de l’exploitation forestière et minière. Dans les régions plus peuplées du Sud du pays, on a considéré les tourbières comme des obstacles et des endroits qui ne servent à rien. Il arrive encore qu’on les considère ainsi. Dans certaines régions, on les a presque entièrement drainées et détruites pour les remplacer par des exploitations agricoles. Il y a encore aujourd’hui des tourbières que l’expansion urbaine risque de faire disparaître. La culture des canneberges, dans le cadre de laquelle on inonde ou assèche des tourbières, et l’extraction de la tourbe constituent d’autres périls auxquels sont actuellement exposées plusieurs tourbières. À divers endroits dans le monde, on a longtemps utilisé la tourbe comme combustible pour le chauffage des maisons. De nos jours, des jardiniers l’utilisent comme substrat de croissance. 

La perturbation des tourbières fait passer dans l’air le carbone qui y était emmagasiné et interrompt les processus de stockage de nouvelles quantités de carbone jusqu’à ce que des travaux de restauration soient effectués. Cela peut aussi avoir un effet sur la qualité de l’eau des environs, car certaines tourbières retiennent des métaux lourds. La fragmentation ou la division d’une tourbière, par la construction d’une route par exemple, ou encore par le drainage d’une partie de sa superficie, entraîne également des problèmes, car cela perturbe la dynamique hydrique de cette tourbière. 

En raison de ces menaces, certaines espèces habitant les tourbières sont maintenant considérées comme étant en péril au Canada. C’est notamment le cas du rossolis filiforme (une plante carnivore qui vit dans les tourbières ombrotrophes de la Nouvelle-Écosse), de la couleuvre mince, de la tortue ponctuée, du massasauga et de nombreuses autres espèces. Le caribou des bois, qui ne passe pas toute l’année dans les tourbières, mais qui y trouve son habitat en hiver, est aussi en péril. 

Les tourbières sont des écosystèmes qui se sont formés sur des milliers d’années. Après endommagement, le rétablissement des sphaignes et d’autres plantes et la formation de nouvelles couches de tourbes peuvent prendre des années. En outre, les tourbières étant souvent éloignées les unes des autres, les espèces qui s’y cantonnent peuvent ne pas pouvoir atteindre ou polliniser facilement un autre endroit qui leur conviendra, en cas de perturbation de leur habitat.


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Actions

 
 Orignaux

La reconnaissance de l’importance des écosystèmes tourbeux s’est accompagnée de l’établissement de nombreuses zones de protection au Canada. À l’échelle nationale, certaines tourbières sont protégées dans les parcs nationaux, par exemple le parc national Wapusk, qui renferme la plus grande étendue de tourbières de plateau polygonales (un type de tourbière ombrotrophe) au Canada, ou bien les tourbières côtières profondes du parc national de Kouchibouguac au Nouveau-Brunswick. D’autres tourbières bénéficient d’une protection provinciale. Le Manitoba a même décrété la protection de 25 p. 100 de ses tourbières! Certaines tourbières, par exemple la tourbière de la Mer Bleue à Ottawa, sont maintenant protégées en vertu de la Convention de Ramsar, une convention internationale sur les zones humides visant à protéger des milieux humides d’importance internationale.

Quant à la faune des tourbières, plusieurs de ses espèces sont protégées au Canada. La Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, par exemple, interdit l’immersion ou le rejet de substances nocives dans des lieux fréquentés par des oiseaux migrateurs, ce qui inclut les tourbières. D’autre part, il est interdit, aux termes de la Loi sur les espèces en péril, d’endommager ou de détruire l’habitat d’une espèce menacée ou en voie de disparition. Ces mesures contribuent ainsi à assurer la conservation des tourbières que ces espèces habitent.

Une meilleure connaissance des tourbières contribue également à leur conservation. Mal comprises pendant des centaines d’années, les tourbières révèlent maintenant leurs secrets! Des chercheurs étudient leurs caractéristiques hydrologiques, géochimiques, microbiologiques et écologiques. Ils examinent leur biodiversité et les moyens d’assurer leur conservation. Des méthodes permettant de favoriser leur restauration après endommagement sont en cours d’élaboration. La restauration a pour objectifs que l’écosystème recommence à accumuler du carbone, qu’il régularise l’écoulement de l’eau et qu’il offre divers habitats convenant à des espèces variées. Des scientifiques cherchent aussi un moyen de cultiver des sphaignes afin d’éviter l’extraction en milieu naturel.


Ce que vous pouvez faire

 
Platanthère blanchâtre de l'Est

Dans un premier temps, un excellent moyen de vous rendre utile aux tourbières est de vous informer à leur sujet et de parler d’elles à votre entourage. Renseignez-vous sur les tourbières de votre région et, si cela est possible, visitez-les pour voir les écosystèmes étonnants qu’elles constituent. Si vous visitez une tourbière, restez sur les trottoirs de bois ou d’autres structures qui ont été aménagées, car à certains endroits le tapis de mousses pourrait ne pas être assez épais pour supporter votre poids et vous pourriez vous enfoncer. Même si vous ne doutez pas de l’épaisseur du tapis de mousses d’une tourbière, il est préférable de ne pas vous y promener, car les sphaignes endommagées ne se rétablissent pas aisément. 

Une autre possibilité utile consiste à éviter l’emploi de produits de jardinage à base de tourbe. Préférez-leur par exemple du compost. Cela aura en outre l’avantage de mettre à profit une partie de vos ordures ménagères! Vous pouvez également retourner la terre pour l’aérer après avoir ajouté du compost ou choisir des plantes appartenant à des espèces indigènes qui poussent bien dans le type de sol que vous avez.

 
 Tourbière Spruce, Parc Algonquin, Ontario

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Réviseurs scienitifiques

Grande Plée  Bleue, Québec

Dr. André Desrochers, Centre d’étude de la forêt, Université Laval

André-Philippe Drapeau Picard, Université Laval et Groupe de recherche en écologie des tourbières

Dr. Peter Lafleur, Trent University

Dr. Marc J. Mazerolle, Centre d'étude de la forêt, Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue

Dr. Jonathan Price, University of Waterloo

Dr. Line Rochefort, Université Laval et Groupe de recherche en écologie des tourbières

Dr. Maria Strack, University of Calgary

Dr. Barry G. Warner, University of Waterloo

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Ressources

 

 
 Calopogon gracieux

Pourquoi les terres humides?
http://www.ec.gc.ca/nature/default.asp?lang=Fr&n=B4669525-1

Le groupe de recherche en écologie des tourbières
http://www.gret-perg.ulaval.ca/no_cache/fr/accueil/

La tourbière de la Mer Bleue
http://ccn-ncc.gc.ca/endroits/mer-bleue

La Convention Ramsar sur les zones humides d’importance internationale
https://www.ramsar.org/fr/search?search_api_views_fulltext=zones+humides

Feux de tourbières et émissions de carbone
https://www.rncan.gc.ca/changements-climatiques/impacts-et-adaptation/changements-climatiques/carbone-forestier/feux-tourbiere-emissions-carbone/13104

En apprendre plus sur les milieux humides
https://www.canards.ca/notre-travail/milieux-humides/

Le réseau des terres humides
http://www.wetlandnetwork.ca/index.php?g_int_AppLanguageId=2

La tourbière : un écosystème à conserver
http://www.mddep.gouv.qc.ca/jeunesse/chronique/2002/0209_tourbiere.htm

Précieuses tourbières
http://www.fleurbec.com/tourbieres.htm

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 2013. Tous droits réservés.

Text: Annie Langlois