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Fédération canadienne de la fauneEnvironnement et Changement climatique Canada
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Description

Le Geai bleu (Cyanocitta cristata) est un peu plus grand que le Merle d’Amérique et mesure environ 30 cm d’une extrémité à l’autre. Il a la face blanche et la huppe, le manteau, les ailes et la queue bleus, parsemés de points noirs et blancs. Les mâles et les femelles se ressemblent beaucoup. La huppe, formée des longues plumes de la calotte, que l’on trouve chez de nombreux geais, se dresse ou s’abaisse selon l’humeur de l’oiseau. Lorsque celui-ci est très excité ou agressif, la huppe se hérisse en une pointe saillante. Lorsqu’il est fort surpris ou excité, elle s’incline vers l’avant. Lorsqu’il a peur, elle se déploie comme un écouvillon. Lorsque la huppe du Geai bleu se dresse, son pourtour est accentué par une raie noire qui lui couvre l’arrière de la tête et prolonge le large collier de sa poitrine. Toutefois, lorsqu’il se nourrit en compagnie d’autres geais, s’apprête à fuir ou se repose, la huppe est aplatie sur la calotte, ce qui donne à l’oiseau un air tout différent, un air quelque peu ébouriffé.

L’appellation scientifique du Geai bleu réunit des mots grecs et latins qui, dans l’ordre inverse, signifient « oiseau bleu, huppé, jacasseur » soit une désignation appropriée. Le Geai bleu appartient à la famille des Corvidés, qui compte une centaine d’espèces apparentées dont les corbeaux, les freux, les choucas, les corneilles, les pies et les geais. Certaines de ces espèces comptent parmi les plus grands membres de l’ordre des Passériformes, ou oiseaux chanteurs percheurs. La famille, qui est répandue un peu partout dans le monde, est le mieux représentée dans l’hémisphère nord. Ses origines remontent à très loin : des fossiles de Corvidés ont été retrouvés dans des dépôts miocènes vieux de 25 millions d’années.

Signes et sons

Le cri du Geai bleu est bien connu des promeneurs des forêts de l’Est de l’Amérique du Nord. Véritable sentinelle, il avertit de ses cris les autres oiseaux et les mammifères de la présence d’un prédateur. En outre, il crie souvent sans raison apparente. Henry David Thoreau, écrivain du 19e siècle, décrivait le son le plus caractéristique du Geai bleu comme étant un « cri glacial incessant », interprété de diverses façon comme ressemblant à thif, à djé et à pir. Le Geai bleu a une grande variété d’autres chants, dont un sifflement serein et musical — klou-lou-lou — et un doux gazouillis continuel entendu pendant la parade nuptiale.

Le Geai bleu se reconnaît de loin à son vol aisé : le corps et la queue forment une ligne droite et les battements d’ailes sont lents, mais le font pourtant avancer à une vitesse respectable.

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Habitat et habitudes

Le Geai bleu occupe toute une variété d’habitats dans son aire de répartition, depuis les pinèdes de la Floride jusqu’aux forêts de conifères du Nord de l’Ontario. Il préfère, aux forêts denses, les forêts mixtes et décidues, surtout lorsque s’y trouvent des hêtres, des coudriers et des chênes. La plupart des Corvidés sont sédentaires, mais certains se déplacent, souvent par petits groupes, après la saison de reproduction.

Le Geai bleu s’est vite habitué à la présence des humains. Dans toute son aire de répartition, il recherche généralement les régions habitées plutôt que les régions sauvages, pourvu qu’il y ait quelques arbres. Dans les bois, il est généralement plus circonspect que dans les villes, où il est presque apprivoisé. Le geai qui revient fidèlement chaque hiver se nourrir à une mangeoire qu’il affectionne pourrait certainement toujours être le même individu puisque le baguage a révélé que certains vivent de dix à quinze ans. Il se peut que ces individus soient plus faciles à apprivoiser que la plupart des autres individus de cette espèce.

Caractéristiques uniques

La couleur bleu de cobalt ou bleu azur intense des plumes de la queue et des ailes du Geai bleu constitue un contraste marqué avec le brun des feuilles ou le vert de l’herbe. Toutefois, ces plumes ne sont pas vraiment bleues. La pigmentation bleue n’existe pas chez les oiseaux. Cette illusion provient de la réfraction de la lumière par une étrange structure interne des plumes. Si l’on froisse ces dernières, le bleu disparaît. Il est fréquent de trouver des plumes vers la fin de l’été, car les oiseaux adultes muent complètement de juin à septembre.

Pendant la mue, ou changement de plumage, il se peut que le Geai bleu pratique le « formicage », terme qui désigne l’application de fourmis ou de leurs excrétions sur les plumes pour les soigner et les lisser. Il arrive souvent que le Geai bleu trébuche sur sa propre queue dans son ardeur à appliquer des fourmis sous ses ailes avec son bec. Selon une hypothèse récente, le formicage s’expliquerait par l’irritation de la peau pendant la croissance des nouvelles plumes. Peut-être les excrétions des fourmis soulagent-elles cette irritation. On sait également que les oiseaux peuvent se servir d’une variété de substituts, tels que les fruits, le tabac, la moutarde et le vinaigre pour le formicage. Un amateur qui avait apprivoisé des Geais bleus en avait observé un qui utilisait divers jus de fruits, amers ou aigres, et même de la lotion capillaire; un deuxième geai n’employait que de la lotion. Un troisième Geai bleu, en captivité chez une autre personne, exposait ses plumes à des cigarettes allumées. Cet étrange comportement mérite une étude plus approfondie. Toute observation de formicage de n’importe quelle espèce d’oiseau vaut la peine d’être signalée à une revue d’histoire naturelle de votre région.


Il ne faut pas condamner le Geai bleu en prétextant qu’il dévore parfois les petits des autres oiseaux, car il joue un rôle important en limitant le nombre de certaines populations d’oiseaux et d’insectes nuisibles. De plus, c’est un séduisant oiseau de nos forêts et de nos villes. Comme le dit si bien Audubon, « Ses mouvements en vol sont des plus gracieux. Alors qu’il voltige d’un arbre à l’autre, ses ailes et sa queue déployées, d’une couleur et d’une forme si belles, ne manquent jamais de réjouir l’observateur. [trad.] »

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Aire de répartition

La répartition du Geai bleu

Le Geai bleu, qu’on retrouve un peu partout dans le Sud du Canada et jusqu’au Texas et en Floride, ne fait que de rares apparitions dans les plaines. Il se reproduit dans les forêts mixtes du Centre de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Sud du Manitoba, du Centre et du Sud de l’Ontario, du Sud du Québec, de l’île de Terre-Neuve, du Nouveau-Brunswick, de l’Île-du-Prince-Édouard et de la Nouvelle-Écosse. Aux confins septentrionaux de son aire de répartition, on le rencontre aussi avec le Mésangeai du Canada (Perisoreus canadensis), un oiseau qui se reproduit beaucoup plus au nord, jusqu’à la limite des arbres. Dans le centre de la Floride, le Geai bleu coexiste avec le Geai à gorge blanche (Aphelocoma coerulescens). À l’ouest des Rocheuses, le Geai bleu est remplacé par le Geai de Steller (Cyanocitta stelleri) qui a presque les mêmes habitudes que celui-ci. D’ailleurs, les habitants de cette province l’appellent « Geai bleu ». La Colombie-Britannique et l’Île-du-Prince-Édouard ont choisi respectivement le Geai de Steller et le Geai bleu comme emblème aviaire.

Le Geai bleu est partiellement migrateur et, certains hivers, il quitte les parties les plus reculées du nord de son territoire pour s’installer à plusieurs centaines de kilomètres au sud. Il voyage de jour, sans se presser, habituellement en volées de cinq à cinquante oiseaux ou plus. On a déjà aperçu 3 000 geais migrateurs en une seule journée au parc national de la Pointe-Pelée, où ils se rassemblent avant de traverser le lac Érié.

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Alimentation

Un tableau célèbre du naturaliste et auteur américain John James Audubon (19e siècle) illustre trois Geais bleus animés en train de se gaver d’œufs fraîchement pondus provenant du nid d’une autre espèce d’oiseau. Les Corvidés sont audacieux et agressifs. Ainsi détruisent-ils souvent les œufs et les oisillons d’autres espèces d’oiseaux. À certains moments, ces oeufs et oisillons constituent une partie importante du régime alimentaire des geais. Toutefois, ceux-ci se nourrissent surtout de végétaux, tels que des fruits sauvages, des glands, des noisettes, des faînes, du maïs et d’autres céréales, et de toutes sortes d’insectes. Ils peuvent ainsi contribuer largement à la lutte contre la chenille connue sous le nom de « livrée ». Au début de l’été, un couple de Geais bleus peut nourrir ses oisillons de centaines de nymphes de cet insecte nuisible. Les parents retirent les nymphes des cocons résistants et soyeux, et en emportent plusieurs à la fois dans leur bec. En détruisant ces cocons, ils empêchent l’éclosion, au printemps suivant, de milliers d’œufs.

Cyanocitta cristata

Cyanocitta cristata
Photo: USFWS/Dave Menke

Comme tout oiseau à régime omnivore, le Geai bleu possède un gros bec capable de percer les cocons ainsi que les glands, les noix et autres fruits à écorce dure. Il emporte souvent des glands et des faînes pour les cacher sous des feuilles, dans l’herbe et dans des arbres creux. Les Geais bleus qui hivernent emportent souvent de la nourriture prise dans des mangeoires, surtout du pain et des graines de tournesol, afin de les enfouir sous des arbres et des arbustes, et les manger plus tard. Pour les attirer, il suffit de garnir une mangeoire d’arachides, de grains mélangés et surtout de graines de tournesol. Les oiseaux semblent prendre plaisir à tenir sous leurs pattes la coque d’une graine ou l’enveloppe d’une arachide pendant qu’ils la brisent avec leur bec pour en retirer l’intérieur.

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Reproduction

Le Geai bleu construit un nid volumineux, d’environ 18 cm de diamètre, fait de brindilles et de divers autres matériaux comme le lichen, la mousse, l’herbe et le papier. Le couple construit le nid et soigne les petits. La cuvette du nid, d’un diamètre de quelque 10 cm, est moulée avec de la boue et tapissée de radicelles et de plumes. Avant de s’établir dans un nid définitif, le couple construit plusieurs nids provisoires, un rituel faisant partie de la parade nuptiale. Ces nids sont situés de 3 à 10 m au-dessus du sol, dans un arbre ou un arbrisseau. Le Geai bleu niche souvent dans des endroits habités, parfois près des bâtiments. Pendant la saison de nidification, notamment dans les parties les plus isolées de son aire, il peut être tranquille et discret, même à proximité de son nid.

Comme chez de nombreuses espèces où le mâle nourrit la femelle couveuse, le Geai bleu pratique lui aussi le nourrissage nuptial. Cela débute avant la construction du nid et continue pendant la ponte et l’incubation (réchauffement des oeufs jusqu’à leur éclosion). Il arrive que la femelle couveuse soit nourrie au nid, mais plus souvent, elle rejoint le mâle dans un arbre voisin. Elle prend alors la position suppliante d’un oisillon, et le mâle la nourrit. On a aussi observé des rituels de groupe où plusieurs geais sautillent d’une branche à l’autre, leurs pattes complètement rigides, mais on n’en sait pas beaucoup plus long sur leur comportement d’accouplement.

Une couvée compte quatre ou cinq œufs. D’une couvée à l’autre, la couleur des ufs varie du jaune clair au verdâtre ou au bleuâtre, tacheté et marbré de brun. L’incubation dure de 16 à 18 jours. À l’éclosion, les oisillons sont absolument nus et sans défense. Cela ne les empêche pas, à certains signaux, surtout au bruit d’un oiseau qui se pose sur le bord du nid, de lever la tête avec le bec ouvert, prêts à recevoir la nourriture de leurs parents. Dix-sept jours plus tard, ils sont couverts de plumes et prêts à quitter le nid. Avant d’avoir 21 jours, ils ont normalement quitté le nid et pris leur premier envol. Environ trois semaines plus tard, ils commencent à s’alimenter seuls, mais ils continuent de suivre leurs parents, qui leur donnent la becquée de temps à autre pendant un ou deux mois encore, parfois même jusqu’à quatre mois.

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Conservation

Parce qu’ils sont généralement sédentaires, la loi ne protège pas certains geais, mais le Geai bleu fait habituellement l’objet de mesures de protection provinciales.

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Ressources

Ressources en ligne

Cornell University Laboratory of Ornithology (en anglais seulement)

Ressources imprimées

BENT, A.C. Life histories of North American jays, crows, and titmice. New York Dover Publications, Inc., 1964.

CRUICKSHANK, H. Thoreau on Birds. McGraw-Hill, Toronto, 1964.

GODFREY, W. E. Les oiseaux du Canada, éd. rév., Musées nationaux du Canada, réimprimé en 1989, La Prairie (Québec), Éditions Marcel Broquet, en collaboration avec le Musée national des sciences naturelles, 1986.

LANSDOWNE, J.F., et J.A. LIVINGSTON. Birds of the eastern forest, vol. II, Toronto, McClelland and Stewart, 1970.

LONG, W.J. Wings of the forest, Garden City (N.Y.), Doubleday and Co., 1957.

POTTER, E.F. 1970. Anting in wild birds, its frequency and probable purpose. Auk 87:692–713.

SALT, W.R., et A.L. WILK. The birds of Alberta, Edmonton, Queen’s Printer, 1966.

STOKES, D.W. A guide to bird behaviour, vol. 1, Boston (Massachusetts), Little, Brown and Company, 1979.


© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 1973, 1979, 1980, 1988, 1992. Tous droits réservés.
No de catalogue CW69-4/22-1992F
ISBN : 0-662-97315-1
Texte : Robert W. Nero
Révisé par : Robert W. Nero, 1991
Photo : Tony Beck